De nouvelles voies sont nécessaires pour le soutien à la presse
Le rapport de l’office fédéral de la communication (OFCOM), rendu public aujourd’hui, confirme les conclusions d’autres études. Ainsi, la qualité et la diversité des médias suisses vont se péjorer au cours des prochaines années. Afin d’enrayer cette évolution, le Conseil fédéral devrait avoir le courage d’enlever ses œillères idéologiques et de proposer ainsi de nouvelles formes de soutien à la presse et au journalisme.
Le rapport de l’OFCOM parvient aux mêmes conclusions que la Commission fédérale des médias (COFEM) et que diverses études de l’institut zurichois de recherche en matière d’espace public et de société (fög) : après une décennie, les éditeurs n’ont toujours pas trouvé le moyen d’enrayer la crise qui frappe les médias. Un modèle d’affaires solide pour le journalisme est vainement recherché, également au travers d’Internet. Ainsi, lorsque même la NZZ ferme son imprimerie, il faut bel et bien l’interpréter comme un signal d’alarme. Les choses sont aujourd’hui claires : si dans 10 ans, il y a une volonté d’avoir une offre médiatique de qualité et diversifiée, il faut passer à l’action !
En ce sens, il est regrettable que, malgré une analyse pertinente de la situation par l’OFCOM, le Conseil fédéral s’obstine à vouloir laisser du temps à la branche, en se montrant très réservé sur la question. Mais du temps pour quoi ; pour mourir ? Pour que la démocratie puisse fonctionner, les médias d’informations doivent être vivants. C’est pourtant ce que pense le Conseil fédéral, qui considèrerait imprudent de supprimer l’aide indirecte à la presse locale, régionale ou à l’attention de membres, avant que ne soit en vigueur un nouveau modèle alternatif de soutien. La présentation des mesures possibles montre cependant la décevante absence de courage du Conseil fédéral.
Ainsi, le projet vise à moins soutenir la formation initiale et continue des journalistes, alors même que les conditions de travail dans les rédactions s’érodent, comme l’atteste le rapport de l’OFCOM. La qualité et la diversité ne peuvent se construire ni gratuitement, ni dans un environnement de stress permanent : l’argent destiné à la formation serait ainsi gaspillé inutilement. Au lieu de regretter les mauvaises conditions présentes dans les rédactions, le Conseil fédéral ferait mieux de proposer des améliorations. Concrètement, il pourrait, après 10 ans, inviter les éditeurs à signer à nouveau une Convention collective de travail (CCT) pour la Suisse alémanique et italienne avec les partenaires sociaux syndicom et impressum.
« L’alliance pour une politique des médias démocratique et équitable », composée du PS, de syndicom et d’Arbus, plaide déjà depuis longtemps pour l’instauration d’un nouveau modèle d’aide directe à la presse, pour des soutiens touchant tous les types de médias ou de journalisme, et pour une augmentation des soutiens publics. L’indépendance du journalisme ne doit pas être touchée. Ainsi, les critères d’accès aux moyens de soutien ne doivent pas être relatifs au contenu, mais bien aux structures et aux conditions-cadre. On pourrait ainsi imaginer une fondation de soutien, comme l’a proposée la COFEM au début de mois de septembre. Le Conseil fédéral, dans son manque de courage, a également rejeté cette idée.
Le rapport de l’OFCOM démontre également que sur la question des médias en ligne, la marge de manœuvre existante est plus importante que ce que veut bien penser le Conseil fédéral (art. 93 Cst). Au lieu d’attendre encore et de discuter sur de possibles nouvelles définitions du service public, les devants doivent être pris, tout comme une position plus ouverte sur le potentiel d’Internet : un coup de pouce pour une diminution de la TVA, plutôt qu’une loi qui rendrait possible le soutien au journalisme en ligne, alors même que la Constitution le permet déjà.
Avec le passage à une aide directe à la presse et touchant tous les supports, une proposition concrète de solution est maintenant sur la table. « L’alliance pour une politique des médias démocratique et équitable » invite le parlement, les spécialistes et le domaine public à s’investir sérieusement dans la discussion sur le futur de notre système médiatique.