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La mémoire pour renforcer la solidarité active

Dans les années 1980, pour 800 jeunes Suisses, leur rêve de solidarité passait par le Nicaragua révolutionnaire. Comme plusieurs autres jeunes volontaires étrangers, deux d’entre eux, les coopérants Maurice Demierre et Yvan Leyvraz, y seront assassinés en 1986. Trente ans plus tard, entre hommage et solidarité, une délégation composée de militants associatifs et syndicaux séjournera au Nicaragua du 18 au 28 juillet.

C’est le 19 juillet 1979 que la victoire insurrectionnelle du Front sandiniste de Libération nationale a mis fin à la dictature Somoza. Le pays est alors entré dans un processus de transformations révolutionnaires et de construction d’un autre modèle de démocratie participative qui a duré onze ans. A partir de 1983 commence une guerre d’agression, menée par les « contras » avec l’appui du gouvernement étasunien de Ronald Reagan. Son bilan a été lourd : plus de 38 000 victimes. La solidarité internationale a participé à la défense du sandinisme et des milliers de coopérants, d’internationalistes et de brigadistes ont travaillé à la reconstruction.

les Syndicats répondent présents

Le gouvernement révolutionnaire a appelé les syndicats à participer à l’effort de développement du pays, explique Philippe Sauvin, coordinateur des brigades ouvrières entre 1984 et 1990, actuellement secrétaire de l’Autre Syndicat et l’un des promoteurs de la délégation qui sera au Nicaragua en juillet.

« Les besoins étaient énormes : infrastructures, construction et transports demandaient un appui international pour développer le pays et surmonter la pauvreté endémique et la violence générée par la dictature de Somoza, surtout dans les zones rurales », souligne Sauvin.

Les syndicats et le mouvement associatif suisse ont répondu présents et, dès 1983, des brigades de solidarité, des brigades de santé et des brigades ouvrières ont participé à la construction de ponts, d’asentamientos (villages coopératifs ruraux pour les paysans sans terres), d’écoles, de centres de santé, de réseaux d’eau potable, ou bien ont aidé à la récolte du café, ou encore ont mené des actions sociales et éducatives.

Le souffle des années 80 toujours là

Trente ans plus tard, le Nicaragua n’est plus le même. « Nous avons tous changé, mais le souffle des années quatre-vingt est toujours là », souligne Gérald Fioretta, de l’Association Nicaragua-El Salvador de Genève et co-organisateur de la Brigade 2016. « La rencontre avec les paysans, les techniciens et les militants sandinistes avec qui nous avons vécu cette période nous permettra d’évoquer les souvenirs, mais surtout de comprendre la situation actuelle pour ainsi renforcer notre solidarité avec plus d’intelligence et de cœur. »

Cependant, le temps ne ferme pas vraiment les blessures. « La disparition crée un vide : ceux qui restent doivent se débrouiller avec l’histoire, la mémoire et la conscience, entrer en résilience, pardonner, rebondir, choisir la dignité d’être vivant parmi des milliards, sous la dénomination d’être humain », pense Chantal Bianchi, ancienne compagne de Maurice Demierre et actuelle présidente de l’Association de solidarité qui porte le nom de l’internationaliste tué en 1986.

Aujourd’hui, la génération des 25-30 ans se sent motivée pour mener des actions solidaires. Pour Bianchi, qui a depuis créé la compagnie de théâtre les arTpenteurs, « elle y trouve la possibilité de s’engager concrètement pour construire des modèles de sociétés pluriels, non intrusifs, écologiques et respectueux des minorités ». La figure de Maurice Demierre donne force et perspective à cette jeunesse en quête de sens. « Un héritage noble, à partager avec joie, générosité et modestie. » C’est ce que pense aussi Franco ­Cavalli, ancien conseiller national, militant historique de la solidarité et fondateur d’AMCA (Aide médicale pour l’Amérique centrale). « La Brigade 2016 est une initiative merveilleuse. Il s’agit non seulement de rendre hommage à nos camarades assassinés et au peuple nicaraguayen pour l’énorme sacrifice consenti dans sa lutte contre l’agression contre-révolutionnaire, mais encore de rappeler que la solidarité internationale est plus que jamais nécessaire à l’heure de la mondialisation sur un continent où l’on assiste à une violente offensive réactionnaire. »

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