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Bataille autour du financement des caisses

Une fois de plus, les politiciens bourgeois et les assurances attaquent les rentes de l’AVS et des caisses de pension.Ils estiment qu’elles devraient baisser, car les rendements ne cessent de diminuer alors que les assurés deviennent toujours plus âgés. Le Conseil fédéral reprend cette antienne. Les syndicats leur opposent de solides arguments. René Hornung *

 

C’est juste : nous devenons toujours plus âgé·e·s. Et l’argent que nous touchons de l’AVS ou des caisses de pension doit durer toujours plus longtemps. A la question de savoir si cette tendance se poursuivra, la plupart des spécialistes de la démographie affirment que le « paroxysme » est atteint : l’âge de la population ne va pas s’accroître davantage ces prochaines années. Mais les sociétés d’assurance – surtout privées – tirent la sonnette d’alarme : le taux de conversion des caisses de pension est toujours trop élevé. Si l’on devait verser aux retraités – comme prévu aujourd’hui – chaque année 6,8 % de leur capital économisé, il ne suffirait à couvrir que 14 ans.

Une caisse de pension peut effectivement se retrouver en difficultés, car – comme le montrent les statistiques – l’espérance moyenne de vie, en Suisse, est aujourd’hui d’un peu plus de 80 ans chez les hommes et de presque 85 chez les femmes. Si les avoirs d’épargne individuels sont épuisés, une caisse de pension doit avoir recours à ses réserves pour garantir les rentes.

Intérêts bas

Un deuxième problème qui a donné du fil à retordre aux caisses de pension ces dernières années, ce sont les recettes relativement modestes tirées des placements. Les produits des intérêts et les gains à la Bourse représentent aussi un « apport » important. Or comme ces recettes sont basses, les fonds versés sur le compte individuel ne rapportent qu’un intérêt de 1,5 % – un taux que le Conseil fédéral redéfinit chaque année.

Les rendements modestes ont un impact sur le « taux d’intérêt technique » d’une caisse de pension. Car c’est sur sa base que les institutions calculent les rendements attendus pour les années suivantes – ce qui se répercute à nouveau directement sur le taux d’intérêt de l’avoir de vieillesse et donc sur les rentes. Et les faibles produits des intérêts et gains modestes à la Bourse influencent eux aussi le « taux de couverture » d’une caisse de pension. Lequel détermine si tous les assurés peuvent retirer d’un coup leur argent sur une période donnée et si une caisse peut remplir toutes ses obligations.

Le Conseil fédéral prévoit du coup de baisser le taux de conversion jusqu’à 6 %, ce qui entraînerait par contre une baisse importante des rentes. Il n’est pas étonnant dès lors que les recettes d’assainissement soient contestées.

Parties obligatoire et surobligatoire

Mais les choses se compliquent encore avec la répartition du deuxième­ pilier entre une part obligatoire et une part surobligatoire.

La loi prévoit que les salaires dès 21 060 fr. et jusqu’à 84 240 fr. par année doivent être ponctionnés par la caisse de pension : les travailleurs et l’employeur versent tous deux la même part à la caisse de pension, qui fixe le montant des cotisations ; elles oscillent souvent entre 6,5 et 9 %.

Dans la part surobligatoire, ces directives ne valent toutefois pas. Si les entreprises paient déjà des cotisations LPP dès le premier franc de salaire versé et si elles assurent aussi de hauts salaires, les réglementations sont beaucoup plus flexibles. Pour cette raison, la caisse de pension des CFF peut aussi annoncer des rentes « variables » (voir page 2). La Caisse CFF n’est pas la seule à vouloir le faire : d’autres caisses de pension, compte tenu du bas niveau des taux d’intérêt, se targuent aussi d’offrir des prestations surobligatoires.

AVS : les actifs paient les rentes

A l’AVS, le problème du taux de conversion n’existe pas. Ici les rentes sont financées dans le système de la répartition (1er pilier) : les cotisations AVS de la population active et de l’employeur sont réparties à nouveau directement sous forme de rentes. Tant que le nombre des salariés continue d’augmenter, les rentes de la population vieillissante peuvent être financées. Or on nous peint le diable sur la muraille en affirmant que l’AVS ne peut plus financer les rentes, alors qu’elle n’a jamais rencontré de véritables problèmes au cours de ses soixante-cinq ans d’existence.

En 1999, le trou dans la caisse AVS a été comblé par une augmentation de la TVA. Avec l’initiative AVSplus, qui veut introduire des rentes de 10 % plus élevées, les syndicats proposent de relever l’impôt sur le tabac. Les relèvements de rentes ne peuvent être financés que par les recettes de l’impôt sur le tabac et l’alcool. Un impôt national sur les successions ferait aussi entrer dans la caisse AVS deux milliards de francs par année.

* Journaliste indépendant

2e pilier : Le Conseil fédéral doit relever à 2,25 % le taux d’intérêt minimal

L’Union syndicale suisse (USS) demande que, pour 2014, le taux d’intérêt minimal de la prévoyance professionnelle (2e pilier) soit relevé à 2,25 %. Aujourd’hui, il est fixé à 1,5 %, alors que la majorité des institutions de prévoyance ont réalisé une performance nettement supérieure en 2012. Ces dernières années aussi, ce taux a été la plupart du temps fixé au-dessous de la performance moyenne des institutions de prévoyance. Or, malgré les bons rendements obtenus (plus de 7 % en 2012 selon une enquête de Swisscanto faite en 2013), la plupart des assuré·e·s n’ont bénéficié que d’un taux d’intérêt de 1,5 %. Cet écart croissant entre performance et intérêts servis aura non seulement pour effet des rentes plus basses, mais entraîne aussi une perte de confiance dans le 2e pilier, qui se traduit par le reproche justifié de vol des rentes.

Le Conseil fédéral doit corriger ce déséquilibre lorsqu’il fixera le taux d’inté­rêt minimal LPP pour l’année 2014 et tenir compte des rendements des placements courants, car cette année aussi, ils sont bons. C’est pourquoi, au lieu de continuer à « geler » ce taux d’intérêt minimal au niveau historiquement bas de 1,5 %, il faut le relever à 2,25 %, comme c’est plus que justifié. (USS).

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