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Il est temps que ça bouge !

Vingt-cinq ans après la grève des femmes et vingt ans après l’introduction de la loi sur l’égalité, le droit à un salaire égal pour un travail de valeur égale n’est pas encore devenu réalité. Le dialogue sur l’égalité des salaires a échoué : seules de rares entreprises conduisent volontairement une analyse des salaires. La moitié sont des entreprises proches de l’Etat ou des institutions communales. Ça ne peut pas continuer ainsi, il faut introduire des contrôles salariaux !

 

Finalement, le Conseil fédéral a lui aussi reconnu la nécessité de ces contrôles. Il a lancé une révision de la loi sur l’égalité, qui doit renforcer la responsabilité de la Confédération. Les contrôles salariaux permettent de créer la transparence, supprimant ainsi les inégalités salariales.

Dans sa réponse à la consultation, syndicom a formulé les revendications suivantes : contrôles réguliers, responsabilité de l’Etat et contrôles ponctuels, sanctions étatiques, association des partenaires sociaux et tolérance zéro en cas d’écarts de salaires dûment constatés. Le résultat de la consultation sera bientôt connu. Le Conseil fédéral devrait en débattre en octobre ou en novembre.

Mais on sait déjà que cette révision se heurte à une énorme résistance dans le camp bourgeois. La droite se défend farouchement contre l’égalité des salaires. Dans le cadre de la réforme sur la prévoyance vieillesse 2020, (voir article p. 11), elle a récemment augmenté l’âge de la retraite des femmes à 65 ans – alors qu’elle continue à torpiller l’égalité salariale.

L’égalité salariale profite à tout le monde

Salarié·e·s et employeurs, économie et société : une vraie égalité salariale est utile à tous. Le dossier USS publié en juin 2016 (Dossier n° 116 : 25 ans après la grève des femmes – Les contrôles des salaires) montre la situation actuelle, l’utilité des contrôles et les expériences réalisées à ce jour dans ce domaine, aussi bien en Suisse qu’à l’étranger. Au chapitre 4, l’utilité et les avantages des contrôles salariaux sont expliqués en détail par l’auteure de cet article.

L’analyse d’impact de la réglementation, effectuée en prévision de la révision de la loi sur l’égalité, montre que près de la moitié des entreprises ayant déjà effectué une analyse salariale interne ont corrigé leur pratique – généralement en augmentant le salaire des femmes. Un sondage du Centre Patronal a en outre révélé que la plupart des entreprises souhaitent la mise en œuvre de l’égalité et ne cherchent pas sciemment à discriminer les femmes. Pourtant, les discriminations existent bel et bien. Elles découlent des stéréotypes de genre et des attentes traditionnelles de la société. Les contrôles de salaires créent la transparence et permettent d’ouvrir les yeux des employeurs et des employé·e·s, par exemple par la publication des résultats dans le rapport annuel de l’entreprise.

Dans un pays comme la Suisse, où il est particulièrement mal vu de dévoiler son salaire, c’est une mesure primordiale pour lutter contre la discrimination salariale. Les entreprises progressistes, qui rémunèrent les femmes et les hommes correctement et de manière identique, sont plus susceptibles de trouver du personnel qualifié. Enfin, les contrôles salariaux permettent d’éviter des procédures légales telles que les plaintes pour discrimination. Non seulement ces procédures sont très longues et émotionnellement difficiles pour les plaignantes mais elles sont aussi très lourdes pour les entreprises, qui perdent ainsi des forces de travail précieuses.

Utiliser LA pression des marchés publics

Par ailleurs, le droit des marchés publics prévoit aussi des contrôles salariaux : la Confédération exige une attestation spontanée des entreprises pour qu’elles respectent l’égalité dans leur structure salariale. La Confédération peut effectuer des contrôles. En cas de non-respect de l’égalité, elle peut exclure des soumissionnaires, révoquer des adjudications du marché et prononcer des peines conventionnelles.

Il est grand temps de mettre en œuvre l’égalité juridique et d’introduire des contrôles de salaires à l’échelle nationale. La majorité des employeurs le souhaitent aussi et sont ouverts à des mesures étatiques : la moitié des 660 entreprises interrogées par le Centre Patronal considèrent que de telles mesures sont acceptables, 26 % y sont même totalement favorables. Si les employeurs et les employé·e·s s’allient pour combattre les discriminations au moyen de contrôles, l’égalité salariale pourrait bientôt se concrétiser.

L’égalité salariale ne se réalise pas d’elle-même !

L’argument de prédilection des entreprises et des partis bourgeois est que la société est en mutation et que le niveau de formation des femmes ne cesse d’augmenter, ce qui selon eux conduit spontanément à l’égalité des salaires. Il est vrai que de meilleures qualifications réduisent les écarts salariaux – mais il faut notamment offrir plus de soutien pour la garde des enfants. Toutefois, la part inexpliquée et donc discriminatoire des différences salariales n’est pas liée au niveau de formation.

Silvia Strub, responsable de l’étude BASS, ne croit pas que les écarts de salaires se corrigeront d’eux-mêmes sans mesures appropriées. L’étude ne montre en tout cas pas d’évolution dans ce sens parmi les jeunes salariées. Silvia Strub estime que chaque entreprise doit analyser sa structure salariale avec l’appui d’une instance extérieure, pour évaluer sérieusement les inégalités et les supprimer.

C’est pourquoi syndicom continuera à se battre pour imposer des contrôles salariaux !

USS (édité par la commission féminine de l’USS) : 25 ans après la grève des femmes – Les contrôles des salaires, juin 2016, dossier n° 116 (bit.ly/2dL3GGY)

Le mariage sanctionne les femmes et privilégie les hommes

Selon l’enquête suisse sur la structure des salaires 2012, les différences de salaires inexpliquées sont presque quatre fois supérieures parmi les personnes mariées (11,6 %) que parmi les célibataires (3,1 %). La problématique des genres, évoquée au chapitre 2 du dossier USS de Regula Bühlmann, y est pour quelque chose. L’état civil des salarié·e·s a une incidence sur les salaires, comme le confirme une étude récente du bureau d’études de politique du travail et de politique sociale BASS : les hommes mariés gagnent 4,4 % de plus que les hommes célibataires, alors que les femmes mariées gagnent 2,9 % de moins que les femmes célibataires, en tenant compte de caractéristiques pour le reste identiques.

Dans le secteur privé, le bonus des hommes mariés est encore plus marqué que dans le secteur public. Des études nationales et internationales comparables le confirment. Cette différence de genre est liée à des stéréotypes et des clichés sur les rôles traditionnels : l’homme est toujours perçu comme le soutien de famille, alors que la femme n’apporte qu’un salaire d’appoint. A cet égard, on attend généralement des femmes mariées des prestations et une flexibilité moins grandes. En revanche, selon des études internationales, l’impact de l’expérience professionnelle sur les écarts salariaux est surestimé. (PM)

Contrôles salariaux dans le secteur public : premiers succès

L’égalité des salaires entre femmes et hommes est prise très au sérieux dans l’administration fédérale. Conformément à la stratégie concernant le personnel de l’administration fédérale 2016 – 2019, le conseiller fédéral Ueli Maurer et les responsables des associations de personnel de la Confédération ont signé un accord pour vérifier la mise en œuvre de l’égalité salariale. L’administration fédérale reconnaît ainsi le principe « à travail égal – salaire égal » et s’engage pour vérifier son application. Ce principe est ancré dans la Constitution. Pour aider les entreprises à le mettre en œuvre, la Confédération avait lancé en mars 2009 le Dialogue sur l’égalité des salaires, en collaboration avec les partenaires sociaux. L’administration fédérale soutient également le nouveau projet Engagement Egalité salariale (ELEP) issu de ce projet pilote.

Par ailleurs, 25 communes et cantons ainsi que la Confédération ont signé la « Charte pour l’égalité salariale dans le secteur public ». Elle était au centre de la deuxième rencontre nationale pour la promotion de l’égalité salariale dans l’administration fédérale. Concrètement, il convient de vérifier régulièrement le respect de l’égalité des salaires, aussi bien dans l’administration fédérale qu’au sein des entreprises mandatées ou subventionnées par le secteur public. La charte peut être signée par tous les employeurs publics et privés. En outre, le Bureau fédéral de l’égalité entre femmes et hommes a créé une nouvelle plateforme internet à ce sujet (bit.ly/2dptdmA). (red)

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