« La ‹ jeunesse › n’est qu’un mot » se plaisait à dire, non sans provocation, le sociologue Pierre Bourdieu. Derrière les définitions des mots « jeunes » et « vieux », il y a les luttes de pouvoir des uns, « nouveaux venus », qui poussent les autres « déjà arrivés » au passé, au dépassé. Les luttes de succession peuvent parfois être intenses quand les « jeunes » y aspirent « trop tôt ». Il y a aussi un désenchantement de certains jeunes qui se rendent compte de la déqualification de leurs titres, dont ils obtiendront souvent moins que n’en avait obtenu la génération précédente. Avec le chômage, les stages sans fin, les jobs intérimaires, une partie de la jeunesse est mise hors-jeu. Bien sûr le taux de chômage en Suisse est plus bas qu’ailleurs et le système d’apprentissage dual helvétique dans lequel les syndicats s’impliquent a de beaux succès. Mais pour que les jeunes trouvent du sens à se syndiquer, il faut que la lutte syndicale et la force du collectif soient plus séduisantes que la voie du chacun pour soi. Les syndicats doivent rester au contact de cette jeunesse qui refuse de n’avoir que la crise et l’austérité comme horizon. Car au-delà des divisions jeunes / vieux, ce sont les conditions de travail et de vie de tous qu’il faut améliorer. Ensemble.